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16 mai 2018 3 16 /05 /mai /2018 08:57

 

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 Les Expositions coloniales, exhibitions, zoos

           Les auteurs des contributions concernées dans la série de ces ouvrages s’en sont donné incontestablement à cœur joie, mais quel crédit historique à accorder à ces discours ? Réalités ou mythes d’écriture ?

         Emphase, exagération, mystification ?

        Résumons quelques-unes des questions et critiques.

      Il aurait été sans doute utile de donner le cadre historique des manifestations proposées, l’identité de leurs organisateurs, publics ou privés, les périodes concernées, ce qui n’a pas été le cas. S’agissait-il d’un phénomène français ou européen ?

      Les rédacteurs ont été quasiment hypnotisés par la grande Exposition Coloniale de 1931 et par le parfum idéologique subtil des exhibitions d’indigènes.

         Un langage savant, un peu bouffi ? : « Cette culture coloniale se constitue par strates. Dans ce processus, les expositions universelles sont des dates structurantes, celle de 1889, particulièrement… (CC,p,9)

       1931 ou l’acmé de la culture coloniale

        « La croisade coloniale devient avec l’exposition comme Jeanne d’Arc, Napoléon, Clovis et la révolution française, une brique supplémentaire dans l’édifice national. Sauf qu’elle se construit en même temps qu’elle s’énonce… » (CC,p,87) 

         Qu’est-ce à dire ?

        Dans le livre La République coloniale, les auteurs écrivent :

    « et la multiplication des expositions universelles ou coloniales. Ces dernières fonctionnent comme de véritables lieux de sociabilité coloniale au sein de la République. »  (RC, p,99)

       « Lieux de sociabilité coloniale » ? Qu’est-ce à dire ?

         Les auteurs font évidemment un sort aux exhibitions d’indigènes, nus ou habillés, un des tops de l’histoire postcoloniale, symbole du racisme et de l’exploitation des êtres humains.

       « Ces exhibitions ethnologiques vulgarisaient donc l’axiome de l’inégalité des races humaines et justifiaient en partie la domination associée à la colonisation.
     L’impact social de ces spectacles fut dès lors immense, d’autant qu’ils se combinaient avec une médiatisation omniprésente qui imprégnait profondément l’imaginaire des Français. » (CC, p,89)

            Sauf que dans le même livre et dans les pages précédentes, p,58 et 59,  un des auteurs écrit :

            « Elles portent en elles le rapport de domination coloniale, même si celui-ci s’applique également, toujours au travers des exhibitions humaines, aux Bretons ou aux Auvergnats, populations considérées par la France centralisée comme des populations « ethniques » encore à civiliser. » (CC,p,58, 59)

           Mais alors Bécassine au recto, et Banania au verso » ?

        Philippe David a fait un gros travail de recherche sur la reconstitution historique des expositions de «  Villages noirs » qui étaient présentés dans des tournées de spectacle en métropole, et la conclusion de ce travail n’était pas la stigmatisation, mais la curiosité et la découverte.

       J’ai publié sur ce blog une longue analyse du livre d’Eugen Weber intitulé « La fin des terroirs » qui relève qu’effectivement les fameux indigènes d’Afrique ou d’ailleurs, existaient alors aussi en métropole.

      Ajouterais-je que les récits des explorateurs et des premiers administrateurs coloniaux donnent des exemples de rencontres avec les peuples africains qui éprouvaient le même type de curiosité à l’égard des premiers blancs qu’ils rencontraient, qu’ils paraient de qualités souvent étranges.

         Je me souviens entre autres d’avoir lu le récit de ce type de rencontre que fit l’africaniste Delafosse, dans les années 1900, dans une peuplade de Côte d’Ivoire, où ils furent observés comme des bêtes sauvages par tout un village dans leur paillote de passage.

        Sur la côte d’Annam, dans la baie de Tourane, dans les années 1880, le médecin de marine Hocquart racontait un épisode du même genre.

            L’« Exposition coloniale internationale de 1931 » ?

      Effet éphémère ou durable de cette Exposition sur l’opinion publique ? Telle est la question à laquelle il faut répondre.

    Notons tout d’abord que, dans son discours, le collectif de chercheurs n’a pas peur des contradictions en n’hésitant pas, dans une page, à affirmer que les expositions ont été des dates structurantes (CC,p,13), tout en indiquant plus loin dans une contribution consacrée spécialement à l’exposition de 1931 :

       « Si l’Exposition coloniale internationale de 1931 est aujourd’hui absente de la mémoire collective des Français, il faut voir dans cet oubli les effets d’un refoulement plus large de l’histoire coloniale qu’il reste à régler. » (CC, p210)

       Et le tour est joué ! Une certaine histoire postcoloniale retombe sur ses pieds, en invoquant un « refoulement », une « mémoire collective » que personne n’a mesurée, et mesurée encore de nos jours.

        L’historien Charles-Robert Ageron a donné une appréciation historique sur cet événement :

       « En 1997, l’historien Ageron a proposé dans un des tomes de la collection « Les Lieux de mémoire », une lecture nuancée de l’événement.

        Dans le livre Images et Colonies, il s’était interrogé sur le point de savoir si le mythe après le choc de la défaite de 1940 : « L’Empire devint la dernière carte de la France, le suprême recours, et beaucoup de Français naguère indifférents ou sceptiques se persuadèrent que l’Empire restait la seule porte ouverte sur l’avenir.» (IC,p,109)

        Une conclusion qui avait donc un caractère très conjoncturel….

      Lyautey, le chef d’orchestre de la manifestation grandiose, partageait ces conclusions. Et l’historien de préciser : « Aux élections de 1932, on vérifia que rien n’était changé : il n’y eut que dix députés pour parler des colonies dans leur profession de foi… »

         Il ajoutait plus loin :

    « Mais d’après le témoignage de tous les mentors du parti colonial, l’historien doit répéter que l’Exposition de 1931 a échoué à constituer une mentalité coloniale : elle n’a point imprégné durablement la mémoire collective ou l’imaginaire social des Français. »

       Question : les députés manquaient-ils donc à ce point de culture coloniale, devenue impériale ? (Chap III – Expositions, page 83 à 107, Sup Col)

JPR  - TDR

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16 mai 2018 3 16 /05 /mai /2018 08:25

Agit-prop postcoloniale contre propagande coloniale ?

Quatrième et dernier mouvement du chemin d’analyse et de réflexion, comme  annoncé sur ce thème

 Résumé et plein phare sur le cœur de cible historique, la « propagande coloniale »

Source, le livre  « Supercherie coloniale »

&

En prologue

       De quelle histoire postcoloniale est-il question ? Celle racontée par le modèle de propagande Blanchard and Co !

       Il n’est évidemment pas dans mes intentions d’affirmer que cette catégorie d’histoire est représentative de l’histoire postcoloniale dans son ensemble.

        Il est superflu d’indiquer que je ne suis pas un historien de formation, mais que j’ai toujours été passionné par l’histoire. Je suis revenu vers l’histoire coloniale et postcoloniale, en grande partie par curiosité intellectuelle, pour compléter ma culture générale, mais tout autant, afin de mieux comprendre et juger les discours que tiennent certains historiens à la mode qui surfent sur une histoire postcoloniale qui dénature l’histoire coloniale.

       Mes études universitaires, puis les fonctions que j’ai exercées dans la fonction publique, m’ont inculqué une rigueur intellectuelle que je n’ai pas trouvée dans les ouvrages que j’ai analysés.

         L’histoire postcoloniale du modèle de propagande Blanchard and Co soulève maintes questions sur l’écriture de l’histoire postcoloniale, comparables à celles énoncées et analysées dans le livre de Sophie Dulucq « Écrire l’histoire à l’époque coloniale », un ouvrage qui a fait l’objet de ma lecture critique sur ce blog.

       J’y relevais notamment que la question de « servilité » de cette catégorie d’histoire se posait effectivement, mais par rapport à quel pouvoir ?

      Dirais-je en passant, qu’après avoir lu, et souvent annoté de nombreux récits publiés à l’époque coloniale, le plus souvent par des explorateurs, des officiers, des administrateurs, et par des spécialistes, j’en ai conservé le souvenir de récits d’histoire que je qualifierais de « brut de décoffrage », souvent bien rédigés, qui se contentaient de nous faire part des faits et observations de toute nature qu’ils effectuaient alors dans leurs pérégrinations civiles ou militaires ?

       Elles étaient loin d’être « fabriquées » et représentent encore de nos jours une sorte d’encyclopédie coloniale incomparable, fut-elle quelquefois ou souvent entachée d’un certain regard de supériorité blanche !

        Une encyclopédie écrite et en images, à consulter la multitude de croquis, de dessins, de cartes, et de photographies, un potentiel de récits et d’images qui ne paraissent pas avoir trouvé leur place historique dans les livres critiqués !

       La richesse de ces sources a été complètement mise de côté par ce collectif de chercheurs, qui ont choisi comme source historique un échantillon d’images de type métropolitain, supposé représentatif, ce qui n’est pas le cas.

      Est-ce que ces travaux d’histoire postcoloniale ne sont pas à ranger, comme tous les autres, dans la catégorie des histoires qui correspondent aux situations successives de l’histoire de France ? Avec toujours le cordon ombilical du pouvoir ou d’un pouvoir qui tient les manettes, l’Église et la monarchie, puis la République laïque et ses hussards, puis le pouvoir idéologique du marxisme, du tiers-mondisme, et de nos jours le multiculturalisme.

        La « servilité » est toujours omniprésente, et sert d’une façon ou d’une autre les pouvoirs régnant dans chacune des situations historiques décrites !

      De nos jours, il s’agit du marché médiatique auquel les éditeurs sont évidemment sensibles, tant ils ont de peine à rentabiliser les ouvrages en sciences humaines, en concurrence sur les réseaux sociaux, à tel point que la « mémoire »  remplace souvent l’« histoire » avec un grand H.

       La véritable question posée n’est-elle pas celle du pouvoir ou des pouvoirs de l’Université face à ces nouvelles concurrences ?

        En ce qui concerne les thèses d’histoire postcoloniale, et compte tenu de leur impact idéologique, pourquoi n’exigerait-on pas qu’elles ne soient pas frappées d’un secret de la confession qui enveloppe le travail et les conclusions des jurys, c’est-à-dire le manque de transparence sur la scientificité supposée de ces  thèses d’histoire ?

       Une suggestion pour finir ce prologue ! Pourquoi ne pas disposer d’un deuxième volet de l‘écriture de l’histoire à l’époque postcoloniale sous le titre « Écrire l’histoire à l’époque postcoloniale » ?

      Le lecteur trouvera ci-après un résumé récapitulatif des critiques qu’ont appelées de ma part les discours du « modèle de propagande  ACHAC-BDM », en mettant naturellement l’accent sur le dossier de la propagande coloniale.

         Ce type de récapitulation n’évitera évidemment pas quelques redites des analyses déjà publiées sur ce blog.

Jean Pierre Renaud  (JPR)   Tous droits réservés (TDR)

 

 

 

 

 

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9 avril 2018 1 09 /04 /avril /2018 18:35

Les quartiers sensibles et la République Française ?

Propositions : un vrai ministre motivé à plein temps, une équipe motivée à plein temps, et un Plan France des Quartiers !

Dans les journaux du jour :

« 15 milliards d’euros pour les formations numériques sur cinq ans », « 10 milliards pour le secteur HLM » …

Combien de milliards pour les quartiers ?

            Depuis de très nombreuses années, je plaide pour que nos gouvernements et nos assemblées décident de mettre en œuvre un plan pluriannuel et global d’insertion des quartiers sensibles dans la République Française.

            Sur ce blog, j’ai appelé à plusieurs reprises l’attention des lecteurs sur ce sujet sensible, à la fois sur les diagnostics et sur les solutions.

            Je rappellerai notamment la chronique que j’avais proposée le 1er mai 2010 pour la lecture du livre de Luc Bronner « La loi du ghetto ».

            Huit années plus tard, les choses n’ont pas véritablement avancé, car si le Plan Boorlo fut une bonne chose, des milliards d’euros pour la rénovation urbaine, il y manquait toutefois un volet politique, culturel, économique et social. A lire la presse, il semble que dans un rapport récent Monsieur Borloo reparte sur la même lancée, les murs et non les hommes.

            Ces quartiers ont besoin depuis longtemps d’une réappropriation de leur tranquillité civile, de la création d’un réseau serré de soutien culturel, social et scolaire, d’un programme d’investissements publics d’aide à la création d’entreprises, d’un véritable effort de longue durée, au minimum d’une dizaine d’années sur l’emploi des jeunes et des moins jeunes de ces quartiers.

            L’Etat, c’est-à-dire vous et moi, en notre qualité de citoyens et de citoyennes, sommes actionnaires de plusieurs entreprises publiques ou privées de moyenne ou grande taille. Il faut les inciter, sinon les obliger à investir dans ces lieux.

            En bref, ces quartiers attendent que la République Française reprenne possession des quartiers !

            J’ai également proposé dans le passé de revoir les procédures publiques pour que juridiquement et réellement, les habitants de ces quartiers soient associés à la vie de leur commune, en faisant appel à des comités de quartiers élus et obligatoirement consultés sur les grands sujets de la cité.

            Enfin, tant que ne sera pas désigné un ministre à plein temps et motivé, disposant de la cagnotte budgétaire nécessaire, de l’ordre de 20 à 30 milliards d’euros, la partie ne pourra pas être gagnée !

            Rappelons à titre de comparaison que les fonds de la formation professionnelle représentent plus de 30 milliards d’euros.

            Deux réflexions pour terminer :

            1 - La France va-t-elle enfin mettre en œuvre un Plan France Républicaine, comme les États-Unis l’avaient fait en 1945 avec le plan Marshall ?

            Les gouvernements de la France sont toujours prêts à dépenser des milliards pour intervenir militairement à l’étranger, au Sahel ou ailleurs, ou à fournir des aides au développement, mais ils n’ont pas le courage de faire face aux défis de ces quartiers.

            Peut-être conviendrait-t-il de créer une Agence Française de Développement pour nos quartiers ? Comme il en existe pour l’Afrique ?

            2 - Il est évident qu’aucune initiative majeure comme celle-là ne connaîtra le succès, sans contrôler, autrement que par le passé, les flux réguliers ou irréguliers de l’immigration.

     Jean Pierre Renaud

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4 avril 2018 3 04 /04 /avril /2018 13:54

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Propagande postcoloniale contre propagande coloniale

       II - « Images et Messages » : synthèse de Mme Anne Hugon (page 51 à 61)

         Compte tenu de l’objet de ce colloque, cette synthèse est évidement la plus importante, étant donné qu’il s’agit de la détermination de la signification des images coloniales, du message qu’elles portaient, pour autant naturellement qu’elles aient fait l’objet d’un dénombrement rigoureux, contexte historique et chronologique par contexte historique et chronologique.

        L’historienne rappelle les différentes thématiques abordées, militaire, mise en valeur, civilisation, ethnographie et discours racial, puis aborde le sujet important :

       « Les discours de la méthode (p,55)

        Plusieurs intervenants ont rappelé, même sans insister outre-mesure, le fait que l’iconographie coloniale ne représentait qu’une quantité modique, voire infime, de la production iconographique globale dans la France du XXème siècle. Daniel Rivet remarquait en introduction que les « grands hommes » de la colonisation passionnaient visiblement moins le grand public que les « grands hommes » tout court ! Quant à Laurent Gervereau, il signalait en conclusion que les affiches politiques sur la colonisation ne constituaient qu’un pourcentage minime du corpus global. Pour être iconoclastes, dans la mesure où elles amènent à nuancer l’idée d’une propagande massive et tous azimuts sur l’Afrique coloniale, ces affirmations ne doivent pas surprendre. En effet, elles rappellent que la recherche sur un point précis produit souvent un phénomène de loupe, à l’issue duquel on peut être amené à exagérer l’importance du fait étudié. Sans sous-entendre un instant que le sujet perdrait son intérêt à cause de cette réserve préliminaire, ces deux intervenants (rejoints d’ailleurs par Jean Barthélemi Debost dans son intervention sur la publicité) estimaient néanmoins nécessaire de l’évoquer.
Par ailleurs, de nombreux conférenciers se sont attachés aux questions de  chronologie…

    … Par-delà ces réflexions sur la chronologie, les communications des divers intervenants soulevaient - même indirectement - le problème des rapports entre le texte et l’image. Dans la plupart des cas, les conférenciers ont projeté des diapositives accompagnées de texte, pouvant prendre des formes variées ; brève légende éclairant une photo, titre d’ouvrage, slogan politique (Fig28), ou texte construit comme dans celui de la bande dessinée (Fig.31). Or le texte revêt une importance capitale dans l’interprétation de l’image, car il renforce ou oriente le sens attribué à l’illustration…

      Cette question du sens accordé à une image dépasse de beaucoup les seuls rapports entre texte et illustration. D’un point de vue plus général, l’ensemble des intervenants a rappelé combien délicat est le décryptage iconographique.

     Ils déplorent l’absence d’une méthode éprouvée qui, comme pour le commentaire de texte, permette non seulement de décrire l’image mais encore de l’analyser. D’autant que si l’on affirme volontiers qu’« aucune image n’est innocente », force est de reconnaître que certaines images donnent moins à voir (et à réfléchir) que d’autres. Plusieurs intervenants ont en effet opposé des illustrations soigneusement composées à des clichés pris « sur le vif », où le souci documentaire prime apparemment sur l’intention propagandiste. C’est le cas de Daniel Rivet, qui a projeté deux diapositives…

      En définitive, on peut s’interroger sur l’utilisation du terme de propagande : d’ailleurs, de nombreux intervenants préfèrent parler de « messages », conformément au titre proposé pour cette partie. La notion de propagande renvoie en effet à une volonté délibérée d’influencer l’opinion publique. Si pour certains domaines, comme l’affiche politique ou les publications sur l’Empire cette volonté de convaincre est indéniable, il n’est pas toujours possible de déceler un tel souci de persuasion…

    Entre message et propagande, se profile la notion d’intentionnalité, mais elle est délicate à prouver. C’est le travail de l’historien. » (p,60) : j’ajouterais volontiers, et du ou de la « sémiologue », car ce colloque a complètement fait l’impasse sur cette discipline.

    Entre 1993 et 2003, il semble que ces questions de méthode aient été passées sous silence par le collectif de chercheurs animé par l’historien Blanchard.

     Je me suis contenté de souligner les mots ou phrases clés importants de la synthèse Hugon,  des mots clés qui pointaient l’ensemble des questions de méthode qu’il convenait d’aborder en tentant de leur apporter une réponse, ce qui n’a pas été fait.

III – « Arts et Séductions » : synthèse par Mme Barbara Boëhm (p,85, à 93)

      Cet exercice de synthèse est d’autant plus difficile à faire que dans le domaine des arts et des séductions, chacun sait que toutes les interprétations sont possibles, et c’est entre autres une des leçons de l’exercice.

       « Nous allons promener notre regard sur une multitude d’images qui ont été produites en Métropole depuis plus d’un siècle, diffusées par des supports aussi variés que complémentaires que sont les arts plastiques (le dessin, la peinture, l’aquarelle et les sculptures), la carte postale, l’affiche ou l’encart publicitaire, le cinéma (documentaires et fictions), véhiculant des « images de séduction » sur l’Afrique et les Africains….

      En quoi cet imaginaire a-t-il pu contribuer à influencer le regard des Français sur l’Afrique et les Africains ? Ces productions artistiques sont-elles de la « propagande », ont-elles contribué à soutenir l’entreprise de propagande coloniale ou sont-elles dissociables du contexte colonial ? Ces interrogations nous permettront de dégager les différents processus et systèmes de représentation et leurs influences dans le cadre de l’imaginaire colonial.

     Témoins de la colonisation ou supports de propagande ?(p,86)

     La carte postale fut certainement le document le plus diffusé, les plus manipulé par les coloniaux à destination de la Métropole, principalement avant la Première Guerre mondiale…

      Philippe David précise, dans le cadre de son intervention sur la carte postale : « Elle est un objet de communication facile, pratique, à prix réduit. Compte tenu de la rapidité et de la fiabilité de la Poste, la carte postale fut extrêmement populaire et massivement utilisée… »

     « Pour clore son propos, Philippe David lance un « plaidoyer pour une analyse objective de la carte postale » et souligne que les productions coloniales grivoises sont extrêmement minoritaires dans le corpus global. Il récuse toute analyse, toute thèse « simpliste » qui n’intégrerait pas  le rapport dans l’ensemble de la production et une production qu’il juge « pornographique ».

      Indiquons qu’elle concerna avant tout les cercles familiaux de Français ou de Françaises partis aux colonies, et que son heure de gloire, chronologiquement parlant, fut plutôt brève.

      De l’ordre du fantasme (p,87)

     « Gilles Boëtsch (anthropologue), quant à lui, part d’un corpus de quatre cents cartes postales extrêmement spécifiques, présentant des « Mauresques aux seins nus ». Il analyse le rapport des Français à la colonisation à travers ces images et comment nous pouvons, aujourd’hui, sans porter de jugement en interroger le sens…

       La thèse soutenue par Gilles Boëtsch suscita de nombreuses réactions. Il a explicité alors qu’il ne s‘agissait pas de dire si ces cartes postales représentaient la réalité ou non, mais de voir que l’on avait constitué une ethnie de plein pied, créé une fiction. La question n’est pas de savoir en quoi ces représentations ont servi, comment elles fonctionnent, et insister sur les rapports que nous pouvons y lire…

       Jean-Bartélemi Debost (docteur en histoire) soulignait :

     «  Je pense donc que le travail d’analyse sur cette fiction, le décodage des messages, ne peuvent se faire que si nous maîtrisons parfaitement l’histoire des systèmes de représentation, la sémantique, l’icologie. (p,88)

       Un anthropologue inventeur d’une nouvelle ethnie, celle des femmes aux seins nus ?

         L’avis différent d’un historien de la photographie :

        «  Lors du débat, Guy Mandry, historien de la photographie, s’est inscrit en faux contre la thèse de Gilles Boëtsch : Il faut savoir que la femme aux seins nus dans la carte postale est un genre convenu, extrêmement répandu, et pas seulement chez les peuples colonisés… Faire cette sélection, c’est modifier la représentation que les photographes ont fait du monde colonial. Cette forme d’image – si elle est critiquable, je ne le nie pas – est aussi une forme d’orientalisme populaire ; si nous le condamnons, il faut aussi condamner l’orientalisme de Delacroix ou celui de Matisse. Or, ici, je n’ai entendu personne le faire. Enfin, je pense que s’il y a fantasme, et il est manifeste qu’il y a fantasme, cela veut dire qu’il y a désir. Et dans désir, il y aussi désir d’adhésion. » (Note 6, p,87)

       De la part de qui ?

       « C’est ailleurs qu’il faut chercher un vecteur d’images de fiction de plus grande diffusion concernant l’Afrique. Le cinéma français de fiction a été incontestablement l’un de ceux-ci tout au long de la période considérée. » (p,88)

      Il s’agit d’une appréciation un peu rapide qui ne tient pas assez compte de la chronologie et des réalités cinématographiques qui n’étaient pas obligatoirement d’origine française et qui se cantonnaient au Maghreb.

      Jean-Barhélemi Debost : « Quand l’exposition « Images et Colonies » sera présentée en Afrique, toutes les images que nous avons visionnées deviendront une réalité pour les ex-colonisés qui ne les ont jamais vues. Tant que ces images, parfois oppressantes, voire violentes, n’auront pas été vues par ceux qu’elles étaient censées montrer, il y aura un dialogue de sourds, car les ex-colonisés ne connaissent pas nos référents, ni ceux de nos parents. » (p,91)

       Le lecteur se rappellera que le même historien était beaucoup plus prudent dans les pages qui précèdent.

Conclusion

        Les participants à ce Colloque ont soulevé beaucoup des questions de méthode que soulevait l’examen des images coloniales et messages présentés, leur dénombrement, leur classement chronologique ou thématique, le sens de ces messages, si message il y avait, ce qui n’a pas empêché une partie des mêmes participants de s’enrôler sous la bannière de l’idéologie, en détournant purement et simplement le sens affiché ou supposé de ces travaux.

       Dix années plus tard, le collectif Blanchard s’engouffrait dans cette voie du détournement, avec l’appui de médias acquis à un anticolonialisme supposé, à la repentance, à l’autoflagellation nationale, sur des fondements pseudo-historiques largement fictifs.

            Jean Pierre Renaud         Tous droits réservés

&

La semaine prochaine, publication de la lecture critique de l'ouvrage "Images et Colonies" (1993)

 

 

 

 

 

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4 avril 2018 3 04 /04 /avril /2018 13:41

6

Propagande postcoloniale contre propagande coloniale ?

Les Actes du Colloque de janvier 1993 (150 pages) : analyse

 

I « Mythes, Réalités et Discours » - Synthèse Mme Catherine Alcoer (page 19 à 27)

« Doctrine coloniale et opinion publique »

      «…  Si l’on peut donc parler d’une idéologie coloniale du point de vue de l’émetteur, celle-ci devient infiniment plus complexe du point de vue du sujet percevant. » (p,19)

        « L’Exposition coloniale : expression du discours politique »

          « … Nous assistons donc au même phénomène de banalisation, l’Empire est entré dans les mœurs…

        Catherine Coquery-Vidrovitch insiste sur le fait que ces représentations, ces mises en scène sont reprises dans la presse de l’époque comme autant de réalités… » (p,23)

« … Il s’agit à présent d’étudier en quoi ce que Catherine Coquery-Vidrovitch qualifie d’entreprises de mythification coloniale à propos de l’exposition de 1931, mais plus généralement l’iconographie coloniale, relève d’un discours politique, mais également quels furent ses prolongements dans l’inconscient collectif. »

       Il convient de noter 1) L’auteure  rappelle dès le départ une distinction capitale dans un tel domaine entre « l’émetteur » et le « sujet percevant » » une distinction quasiment oubliée dans le discours du collectif de chercheurs, 2) que Catherine Coquery-Vidrovitch a été une des promotrices de l’introduction de l’inconscient collectif dans ce débat savant, 3) qu’elle fut la Présidente du jury de la thèse de doctorat de M.Blanchard, une thèse qui ne fit qu’effleurer les terrains d’évaluation de la presse, 4) que l’analyse de la presse de l’époque, seul vecteur susceptible de proposer une évaluation de l’opinion publique n’a pas été effectuée.

         « Iconographie coloniale, réalité et phantasmes »

        « Comprendre, expliquer l’impact de l’iconographie coloniale auprès du public exige de prendre en considération les conditions internes et externes qui ont présidé à sa conception, d’où la difficulté méthodologique

       « Expliquer l’impact… d’où la difficulté méthodologique » (p,24)

        Il s’agit d’une des difficultés de la méthode historique, à côté de beaucoup d’autres.

        Après la guerre de 14-18, et d’abord dans le cas de l’Algérie : « …Toujours pour Gilbert Meynier, ces images coloniales touchent finalement assez peu la masse française qui, toute à sa nouvelle prospérité, ne semble pas convaincue de l’apport des colonies en la matière… » (p,25)

     « … L’imbrication étroite de la réalité et du fantasme dans l’iconographie coloniale et dans ses répercussions sur l’inconscient collectif amène un problème de méthodologie majeur quant à l’étude de ces images. A partir du moment où les observateurs historiens ex-colonisateurs, ce qui est le cas de la plupart de nous tous, à partir du moment où des observateurs se déclarent objectifs, distants mais possédant un bagage culturel qui lui n’est pas objectif », affirme Catherine Coquery-Vidrovitch. Elle poursuit : « je fais métier de ne pas croire à l’objectivité puisque le travail de l’historien est précisément un travail de doute. .. « (p,26)

        Jean Devisse (le directeur de la thèse de doctorat  Blanchard) souligne cependant la nécessité d’ouvrir ce dossier et non plus d’en avoir peur. « Ce qui me semble évident c’est qu’il faut un inventaire complet, total, de tous les aspects, même ceux qui nous gênent beaucoup, de tous les aspects de cette longue période que nous avons occultée. Nous n’avons pas occulté que la guerre d’Algérie (…) Le rassemblement d’images, la constitution d’un corpus, ce n’est pas de l’histoire, c’est la base de matériaux qui permet ensuite de construire une réflexion historique. »

         Le travail de l’historien devra toujours pour Jean Devisse, « faire table rase des clichés, des images mentales, transmises presque génétiquement et porteuses de désastre pour les relations entre la Nord, la France et ses territoires extérieurs. ….

        Mais  au préalable, pour analyser ces images il faut apprendre à s’en méfier et être attentif à leur prolongement dans notre inconscient. » (p,26)

       L’auteur écrivait « Nous n’avons pas occulté que la guerre d’Algérie », une observation contradictoire avec celles de Benjamin Stora, historien de l’Algérie, qui écrit dans « Images et Colonies », à la page 257 : « guerre qui contrairement aux idées tout faites, a été montrée dans la presse quotidienne (lorsqu’elle n’était pas censurée) et dans les magazines à grand tirage. »

        Problèmes de méthode sûrement, non réglés tout aussi sûrement, mais à voir l’irruption de l’inconscient  dans ce débat historique, aucun participant ne semble avoir proposé de méthode d’analyse historique ou non.

        Catherine Coquery-Vidrovitch écrivait dans sa contribution :

        L’historien, l’image et les messages «  En dernier point, j’en viens à une réflexion personnelle. Le sujet qui nous occupe ici est passionnant, les sources sont extraordinaires. J’ai donc cherché à comprendre pourquoi je n’avais pas envie de venir parler dans ce colloque qui s’annonçait pourtant extrêmement intéressant et dont je reconnaissais scientifiquement tout l’attrait.
      Pour comprendre un réflexe de ce type il faut faire la psychanalyse de l’historien. » (p,30)

        L’historienne explique cette réflexion tout à fait personnelle par son propre passé, mais elle accrédite la thèse que je défends sur certains discours postcoloniaux, à savoir qu’il est difficile, sinon impossible pour un historien dont le vécu est contemporain de l’histoire qu’il veut raconter d’être suffisamment détaché des sources consultées.

       L’historien Goubert a d’ailleurs pris une position très nuancée sur le sujet de la « fabrication » de l’histoire contemporaine.

         Dans sa contribution, l’historienne Annie Rey-Goldzeiger sur le Maghreb et la France du XIXème et du XXème siècle a également pointé le rôle supposé de l’inconscient, mais en reconnaissant son échec à proposer une méthode d’analyse : « Aussi n’essaierai-je pas de formuler une méthode sûre pour aborder ce sujet qui m’a interrogée depuis longtemps : j’ai cherché une méthode de recherche qui, je l’avoue, n’a pas été trouvée. » (p,38) 

       Ce qui ne l’a toutefois pas empêché de lui attribuer un rôle important dans son analyse historique !

       Dans le livre « Supercherie coloniale », j’ai consacré un de mes chapitres au « ça colonial », et très récemment j’ai tenté de démonter la propagande du « modèle de propagande des raisins verts », animé par des enfants de parents « coloniaux » d’Algérie ou du Maghreb.

      Ces chercheurs ont eu en effet un passé qui les a mis en rapport avec le monde colonial algérien, un passé qui ne pouvait leur être indifférent, comme ce fut également le cas pour l’historien Gilbert Meynier.

       Dans la première séquence « Mythes, Réalités et Discours », l’historien affichait ce concept d’inconscient dans le titre même de sa contribution :     « Volonté de propagande ou inconscient affiché ? Images et imaginaires coloniaux français dans l’entre- deux-guerres ». (p41)

       L’auteur précisait qu’il s’exprimait sur les « indigènes » dans le cas algérien principalement.

         «Propagande et thèmes coloniaux Le lendemain de la guerre est un temps d’incantations volontaires du Parti colonial et de ses escortes idéologiques et médiatiques. Une foule de livres… des flots de brochures, de tracts, de films destinés à exalter l’idée coloniale…. Ces images coloniales touchent finalement assez peu la masse française… ». (p,44) 

        « Imaginaire colonial et inconscient français »

        « Les ambitions coloniales sont parallèles à la volonté de vulgarisation concernant les colonies. Cette vulgarisation touche pourtant différemment la masse française et l’élite de la foi coloniale… Le drame est que ces images des colonies, répondant à un inconscient français prioritairement hexagonal, sont émises au moment même des prodromes de la « décolonisation ».

       Quoiqu’il en soit, l’imaginaire même de la France coloniale ramène d’abord au pré-carré français et il doit très peu au grand large. » (p,48)

        Le lecteur est-il plus avancé ?

         Jean Pierre Renaud     Tous droits réservés

 

 

 

 

 

 

 

 

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4 avril 2018 3 04 /04 /avril /2018 13:28

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Propagande postcoloniale contre propagande coloniale ?

Deuxième partie

Une relecture historique postcoloniale savante avec deux sources:

  • le Colloque de janvier 1993 sur le thème « Images et Colonies »
  • le livre « Images et colonies »

&

Le Colloque de 1993

Organisé par l’Achac du 20 au 22 janvier 1993 à la Bibliothèque Nationale Française

             A l’origine de la thèse de ce collectif, il convient de se reporter au Colloque Universitaire de janvier 1993 (C) sur le thème « Images et Colonies » avec la participation d’une brochette d’historiens connus et reconnus. Pascal Blanchard fut l’un des deux secrétaires de la rédaction de la synthèse de ce colloque  savant.

                             Je serais tenté de dire qu’il s’est peut-être approprié les travaux de ce colloque.

          Nous verrons dans le détail les écarts d’interprétation historique qu’il  convient de relever entre les avant-propos du duo Blanchard - Bancel et le contenu des Actes du Colloque ainsi que celui de l’ouvrage Images et colonies.

          Les contributions ainsi que les très nombreuses illustrations qui figurent dans le compte-rendu de ce colloque savant, de même que dans le livre,  sont pleines d’intérêt, mais leur contenu ne permettait pas en effet d’induire que la France de l’époque coloniale baignait dans la « culture coloniale » décrite par le collectif Blanchard, dans un « imaginaire » colonial qui a leur faveur.

          Qui plus est, le thème même de ce colloque, outre son contenu historique, posait la question de l’interprétation des images avec la contribution insuffisante de la sémiologie, laquelle sauf erreur, y était absente !

         Le contenu de ces travaux ne constituait donc pas une assisse scientifique suffisante pour énoncer certaines conclusions des deux auteurs de l’introduction (M.Blanchard et Mme Chatelier) :

     « …  le temps colonial se réapproprie le présent, que l’image fut l’alliée puissante du colonialisme… et que cette multiplication des images coloniales et la variété de leurs supports, évoquent un véritable bain colonial. » (Introduction Colloque, p,14)

      Nous verrons au fur et à mesure de notre analyse ce qu’il convient de penser de ces affirmations audacieuses, tout en montrant qu’au cours de ce fameux colloque, toutes les contributions se rapportant aux différents supports d’information ou de culture, et tant s’en faut, n’ont pas fait preuve de la même belle et imprudente assurance historique. 

        Dans le livre « Supercherie coloniale », j’ai récapitulé la série de critiques qu’appelait ce type de discours historique sur l’ensemble des vecteurs d’une culture coloniale supposée, les affiches, les livres, les expositions, les écoles, les journaux, le cinéma… et sur leurs effets supposés dans une opinion publique jamais mesurée.

        Car telle était la critique la plus sérieuse que je formulais, l’absence de mesure, d’évaluation des vecteurs proposés avec leurs effets sur l’opinion, alors que le seul vecteur qu’il était possible d’analyser sérieusement était alors la presse.

        La thèse du collectif Blanchard ne s’inscrit en effet pas dans une histoire « quantitative » qui aurait pu la qualifier pour être représentative de son objet, de ses objets, car ils sont multiples : il s’agit de la carence de méthode la plus grave, et c’est sans doute ce qui fait sa différence avec la thèse Huillery dont tous les efforts ont porté sur une « représentativité » historique supposée dans la ligne de l’histoire « quantitative », mais sur un terrain exotique et  géographiquement localisé.

&

            Afin de bien comprendre les enjeux historiques, méthodologiques, et en définitive politiques et idéologiques du débat qu’il faut ouvrir sur le discours du collectif de chercheurs animé par l’historien Blanchard, avec l’appui de l’association Achac, il est nécessaire de revenir en effet à la source, c’est-à-dire le colloque savant qui eut lieu en janvier 1993 sur le thème Images et Colonies, en consultant les Actes publiés, leur introduction (Signatures Blanchard et Chatelier), leur conclusion (Signatures Debost et Manceron), ainsi que les différentes synthèses effectuées sur chacune des catégories de thèmes retenus :

            I « Mythes, Réalités et Discours » : synthèse par Mme Catherine Alcoer

            II «  Images et Messages » : synthèse par Mme Anne Hugon

            III « Arts et Séduction » : par Mme Barbara Boëhm

            IV «  Regards croisés » : sans synthèse

            La liste des participants comptait 39 noms, pour deux tiers d’entre eux des historiens et historiennes, mais il convient de noter que la discipline de la sémiologie ne comptait aucun participant, alors que la Colloque avait l’ambition d’analyser, avant tout,  des images et des messages.

            Il est important de revenir sur ce Colloque qui a analysé des lots d’images triées et proposées, si j’ai bien compris, par l’association Achac, première étape du parcours « historique » des chercheurs qui ont publié l’important volume intitulé « Images et Colonies » - (1880-1962) » comptant près de trois cents pages de textes et d’images, souvent très belles, incontestablement un travail de collection tout à fait intéressant.

            Au cours de la deuxième étape, le collectif de chercheurs a exploité ces sources et publié la série d’ouvrages relatifs à la Culture coloniale, impériale, à la Fracture coloniale, et à la République coloniale, « apanages » supposés de notre pays.

            La question de fond que posent ces parcours historiques est celle de savoir quels étaient les objectifs de ce colloque,  (voir mes soulignés), selon les deux auteurs de la conclusion :

         « La réflexion entamée par ce colloque a soulevé davantage de questions qu’elle n’a apporté de réponses. L’objectif n’est rien moins que, aussi bien dans l’Europe colonisatrice que dans ses anciennes colonies, la déconstruction d’un imaginaire que ces images, pendant des décennies, ont contribué à édifier. Cela implique de nouveaux débats et de nouvelles rencontres ainsi que des incursions scientifiques dans des domaines extrêmement divers qui vont de certains aspects délaissés de l’histoire politique et économique de l’Europe contemporaine, à l’ethnographie, la sociologie et l’histoire régionale, politique et économique africaine, sans oublier une prise en compte de l’histoire de l’art, de celle du cinéma, de la photographie et de la publicité et la sémiologie de l’image. C’est à ce prix que l’on pourra œuvrer efficacement pour l’histoire comme pour l’avenir. » (p,148)

        Vastes chantiers donc à ouvrir, qui n’ont pas été ouverts, et qui n’ont pas empêché ces chercheurs de s’engouffrer dans celui de « l’avenir » c’est à dire celui de l’idéologie et de l’immigration.

      Vaste ambition, vastes chantiers, lesquels reposaient sur de nombreux postulats d’évaluation, de mesure, à vérifier, et à valider, aussi bien en Europe que dans ses colonies, qui n’ont pas été vérifiés et confirmés, comme nous le verrons dans le cas français, pas plus que l’existence de « l’imaginaire » énoncé.

        Le lecteur aura donc la possibilité de se poser la vraie question, à savoir si ce type de discours n’irrigue pas plutôt une construction anachronique et idéologique, tout à fait artificielle, d’un imaginaire qui a la faveur de ces chercheurs, un imaginaire censé expliquer ce qui se passe dans certains territoires de notre pays, un imaginaire qui n’a jamais été décrit et mesuré depuis plus de vingt années.

       La lecture de ces conclusions est fort instructive car elles ne militent déjà pas pour la thèse « historique » que je viens de rappeler, fusse celle de l’introduction signée Blanchard Chatelier, en dépit des imprécisions, affirmations et questions qu’elle contient.

        Dès le troisième paragraphe de cette dernière, les auteurs évoquent la période de Vichy comme un précédent de leur analyse, une référence pour le moins ambiguë, mais à laquelle ils ont fait un sort : d’après eux, la période coloniale aurait souffert de la même amnésie que celle de Vichy : colonisation française = Vichy ?

          Ils écrivent : «  Nous nous attacherons ici à ne présenter que des images dont on peut évaluer la diffusion et qui, par conséquent, ont été lues par les Français… Cette multiplication d’images coloniales et la variété de leurs supports, évoquent un  véritable bain colonial. » (p,14)

      La phrase soulignée est une contre-vérité alors que leur thèse souffre d’une carence généralisée de l’histoire quantitative, c’est-à-dire l’absence d’évaluation.

     Bain colonial ou non ? Telle est la question, et les auteurs écrivent :

      « Ce bain colonial est-il le fruit d’une volonté politique ? », et les auteurs bifurquent aussitôt sur les figures de l’« indigène » et de l’immigré, le véritable objectif d’une démonstration historique supposée.

      Les deux auteurs ajoutent : « Il semble que ces images soient devenues des réalités  pour une majorité de Français, qui ne doutent pas de leur véracité. » (p,14)

      Il « semble » ? Les deux auteurs nous plongent en effet dans une grande perplexité, un doute insupportable !

       Les deux auteurs posent la question : « Quel impact cette propagande a-t-elle eu ? » (p,15) 

     Alors, bain colonial, oui ou non ?  Réalités, oui ou non ?

     Les deux auteurs évoquent à la fin, « un flot d’images » « reflet des phantasmes et des peurs de l’Occident ».

     En définitive, de quelle déconstruction  ou construction historique s’agit-il ? Pour démontrer quoi ?

      Est-il question des « phantasmes » des Français ou des « phantasmes » actuels du collectif de chercheurs, car les trois textes de synthèse proposent  un certain nombre de questions méthodologiques qui ont été abordées par des participants, auxquelles aucune réponse n’a encore été apportée.

Jean Pierre Renaud Tous droits réservés

 

 

 

 

 

 

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4 avril 2018 3 04 /04 /avril /2018 09:48

4

Propagande postcoloniale contre propagande coloniale ?

Eclairage critique sur le modèle des Lettres Persanes !

 

           Une histoire postcoloniale idéologique au service de l’autoflagellation nationale !

      Avec la mondialisation, l’explosion démographique de l’Afrique, le multiculturalisme en vogue, une arrivée tout d’abord clandestine de l’islam dans notre pays, la poursuite de flux d’immigration, régulière ou clandestine, qui viennent grossir la population des quartiers sensibles, dont certains semblent en partie échapper aux règles républicaines, il est évident que des discours historiques souvent habillés de fausse science ne facilitent pas l’intégration de populations qui cumulent les handicaps.

          Dans le livre « La Fracture Coloniale »  (2006- Sous la direction de la triade Blanchard, Bancel et Lemaire),  leurs trois auteurs n’hésitaient pas à écrire :

           « Retour du refoulé…qui font de la fracture coloniale une réalité multiforme impossible à ignorer (p.10)… la colonisation a imprégné en profondeur les sociétés des métropoles colonisatrices, à la fois dans la culture populaire et savante (ce que l’on nommera ici une culture coloniale) (p.13). De ce champ de bataille mémoriel (p.23)… la banlieue est devenue un théâtre colonial » (p.23).

         Un champ de bataille mémoriel, s’il existe, ouvert par cette catégorie de chercheurs !

        Ces récits sont évidemment de nature à créer un état d’esprit dangereux pour la paix civile, comme on le voit aujourd’hui avec les tentatives d’un Islam radical pour déstabiliser la République dans son état de droit, dans ses modes de vie, dans son respect des libertés de conscience et d’expression, dans le droit des femmes.

          A Alger, le 21 février 2017, au cours de sa campagne électorale, le Président actuel a eu le très mauvais goût  de juger que la colonisation française en Algérie fut « un crime contre l’humanité ».

          C’est l’exemple même de la caricature historique.

        Les carences de méthode intellectuelle : les deux exemples de la thèse du collectif Blanchard sur la période coloniale et de la thèse Huillery sur l’ancienne Afrique Occidentale Française.

       Elles ne sont pas obligatoirement représentatives des travaux actuels de l’histoire postcoloniale, mais elles bénéficient de toute la lumière que lui accordent sans compter  les médias.

        J’ai passé beaucoup de temps à analyser les deux types de thèse, la première assez classique pilotée par Pascal Blanchard, et celle novatrice, richement dotée en outils économétriques, d’Elise Huillery.

        Les cibles de la thèse Blanchard sont très ambitieuses, en temps et en lieux, alors que la cible de la thèse Huillery est cantonnée à la seule Afrique Occidentale : il est évident que la taille des cibles n’est pas du tout  la même, tout en notant qu’en choisissant pour cible l’ancienne Afrique Occidentale Française, Mme Huillery a fait un choix qui n’est pas anodin, compte tenu des relations de toute nature que la France a conservées avec ces territoires..

       La thèse du Collectif Blanchard s’est exprimée dans les ouvrages : thèse Blanchard Sorbonne 1994 (TB) - Culture Coloniale 2003 (CC) - La République Coloniale 2003 (RC) - Culture Impériale  2004 (CI) - La Fracture Coloniale 2005 (FC). L’Illusion coloniale 2006 (ILC)

&

         Il serait dommage de ne pas rappeler que le manuscrit « Supercherie coloniale » a fait l’objet d’une lettre de refus très aimable de la part d’un des grands éditeurs de la place, dont vous trouverez ci-après l’essentiel du texte :

       « Paris le 5 juillet 2007

        Concerne : Supercherie coloniale.

      Cher Monsieur,

        Je vous remercie vivement de vos deux textes.

         Je les ai appréciés à leur juste valeur, bien entendu, sur la même longueur d’onde que vous. Mais, pour vous dire la vérité, je n’ai aucune envie de me lancer ou de laisser …. se lancer dans une polémique directe avec des auteurs nommés (et dont un a même été publié dans la Maison !).

           Votre avant-scène postcoloniale m’a par ailleurs bien amusé.
        J’espère que vous trouverez un autre éditeur et vous assure, cher Monsieur, de tous mes sentiments les meilleurs. »

       N’ayant pas trouvé d’éditeur, j’ai fait appel à une petite maison d’autoédition.

      Puis-je rappeler aussi le petit écho que j’avais donné sur ce blog à la mésaventure « idéologico-politique » que ce livre avait connue avec la Mairie de Paris (mandat Delanoë) ?  Une bonne citoyenne m’avait informé gentiment qu’elle avait trouvé l’un des deux spécimens que j’avais pris le soin de déposer auprès du service des bibliothèques, dans une librairie-solderie de Paris.

          Il me parait donc intéressant de proposer ci-après le texte de « l’avant-scène postcoloniale » aux lecteurs :

« En avant-scène postcoloniale »

Et sur les pas du célèbre Montesquieu

Comment peut-on être Malgache à Paris au XXI° siècle ?

            De Jérôme Harrivel, Cité Universitaire Internationale, à Paris, à sa chère et tendre Vola, restée à Faravohitra, à Antananarivo,

       Octobre 2001 - Comme tu le sais, à l’occasion du match Algérie France, dans ce magnifique stade de France, (quand en aurons-nous un aussi beau dans notre belle capitale ?) une partie du public a sifflé l’hymne national des Français. Tu vois le scandale ! Je n’y étais pas, car tu connais l’amour très modéré que je porte au sport. Cela m’a beaucoup étonné, moi qui croyais que l’Algérie était indépendante depuis 1962. La France était-elle devenue, à son tour, la colonie de l’Algérie ?

    Septembre 2003 - Des amis français m’avaient convié à une soirée à la campagne, une campagne toute verte comme tu l’aimerais, près du Mans. A un moment donné, un des convives se mit à évoquer des livres récents qui traitaient de l’histoire coloniale de la France. Tu sais que les Français ne s’y intéressent pas beaucoup,  mis à part la guerre d’Algérie, qui a laissé des traces profondes dans beaucoup de familles françaises.

            Je ne m’estimais pas vraiment concerné, lorsque j’entendis ce convive parler de « bain colonial », et aussitôt je fis une association d’idées avec notre grande fête du bain de la Reine, notre « fandroana », mais il ne s’agissait pas de cela. C’était bien dommage, car la cérémonie du bain revêtait une grande importance  dans notre monarchie. Beaucoup de faste, une grande foule, le bain de Ranavalona III derrière le rideau rouge, la couleur sacrée, avec ce petit grain de folie religieuse qui mettait du sel dans le rituel sacré du bain, l’aspersion de la foule venue entendre le « kabary » de la reine et assister à son bain caché, avec l’eau qui avait servie au bain de la reine, une eau naturellement sacrée. Une lointaine parenté sans doute avec l’eau bénite, sans vouloir blasphémer le rite catholique !

       Février 2005 - Un de mes bons amis malgaches m’a entraîné au Forum des Images de la Ville de Paris pour assister à une des séances du festival des films coloniaux qui y avait lieu.

            Deux personnes commentaient ces documents, un belge, je crois, et un universitaire africain dont j’ignorais le nom. Pour nous mettre sans doute dans l’ambiance idéologique de cette séance, le présentateur belge avait distribué une note de présentation dans laquelle il énonçait quelques fortes vérités, je cite :

           « C’est au nom de la légitimité coloniale que l’on filme les femmes au torse nu…c’est la relation d’assujettissement du colonisé au colon. C’est la violence légale,  naturelle de l’ordre colonial qui apparaît lorsque l’on regarde ces images… on perçoit régulièrement les signes d’un déni d’humanité accordé à l’indigène dont le filmeur (sic) d’alors n’avait pas conscience. »

        On nous a projeté plusieurs films d’amateurs de qualité tout à fait inégale. L’un d’entre eux a attiré mon attention, parce qu’il avait été tourné chez nous, par un vazaha (un blanc) sans doute riche, car il le fallait pour disposer d’une caméra. A un moment donné, on voyait une femme blanche assise dans un filanzana, notre fameuse chaise à porteurs, portée donc par quatre bourjanes, et le commentateur de souligner doctement, et une fois de plus, que cette image était un autre symbole du colonialisme en action.

       A la fin de la projection, un vazaha s’est levé et a pris la parole pour expliquer à la salle que tous les gens riches de Madagascar, nobles, hauts fonctionnaires militaires ou civils, marchands fortunés recouraient habituellement à ce mode de transport à une époque où il n’y avait aucune route dans l’île, et donc aucun véhicule à roues. Je me suis bien gardé d’intervenir, mais l’échange m’a bien amusé.

        Mai 2005 -  Un grand débat agite les médias et le microcosme politique, sur l’esclavage et  le rôle positif de la colonisation française. Des députés, toutes tendances confondues, de droite et de gauche, ont eu une foutue bonne idée de faire reconnaître par la loi le rôle positif de la colonisation. Grand chahut chez les historiens et au sein des associations qui ont l’ambition de défendre la cause des populations immigrées, notamment de celles qui ont publié un appel d’après lequel, leurs ressortissants seraient les  indigènes de la république.

            Prudence de notre côté étant donné le passé de notre grande île et de l’abolition relativement récente de notre esclavage. Certains de nos lettrés ne disent-ils pas que les descendants des andevos, nos anciens esclaves, portent encore dans leur tête leur passé d’esclave, avec la complicité des descendants de leurs anciens propriétaires d’esclaves. Nous sommes d’ailleurs bien placés à Madagascar pour savoir que la traite des esclaves s’est prolongée longtemps en Afrique de l’Est, dans l’Océan Indien, et dans le Golfe Persique, avec les traditionnels trafics arabes d’esclaves.

            Je te signale d’ailleurs qu’une historienne de La Réunion prend des positions hardies dans ce difficile débat.

            Je recommanderais volontiers la même prudence aux descendants des grands royaumes négriers de l’Afrique du Centre et de l’Ouest.

        Novembre 2005 - En France, la mode est aujourd’hui à la repentance. Les Français adorent ça et se complaisent dans leurs défaites militaires qu’ils célèbrent avec une joie masochiste. Le président Bouteflika somme la France de se repentir, alors que la guerre d’Algérie a été un affrontement de violences des deux côtés, et que l’Algérie indépendante sort à peine d’une guerre civile cruelle.

            Dans toute cette affaire, plus personne ne comprend plus rien à rien, entre ce qui relève de la mémoire et ce qui relève de l’histoire ! Je me demande si certains historiens ne s’intéressent pas plus à la mémoire qu’à l’histoire.

        Octobre 2006 - Tu vois, l’Algérie est toujours au cœur du problème français, et certains historiens ont du mal à travailler sur l’histoire coloniale sans être obsédés par l’Algérie, toujours l’Algérie, qui parait d’ailleurs de plus en plus présente en France, plus de quarante ans après son indépendance. Un politologue, espèce difficile à définir, a commis un livre, ou plutôt un crime contre la raison, en énonçant le postulat qui voudrait que « Coloniser,  c’est exterminer », et bien sûr en raisonnant sur l’Algérie. Ce politologue s’est fait ramasser dans les grandes largeurs par deux éminents historiens de l’Algérie.

              Ce mois-ci, Blois a accueilli les 9ème Rendez Vous de l’Histoire. A l’occasion d’un Café Littéraire, tu te souviens du rôle des cafés dans l’histoire littéraire parisienne, un dialogue musclé s’est engagé entre le principal prosélyte d’une nouvelle histoire coloniale et l’auteur d’un livre intitulé « Pour en finir avec la repentance coloniale », précisément dans le cas de l’Algérie. Le prosélyte de lui lancer : « Vous êtes un historien révisionniste, ça vous fait triper (sic) ». Je me serais bien gardé d’intervenir dans ce débat : il n’y a pas si longtemps, notre grand Amiral marxiste, dictateur et chef de l’Etat, aurait brandi aussi facilement ce type d’accusation. » Jérôme Harrivel

Jean Pierre Renaud Tous droits réservés

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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4 avril 2018 3 04 /04 /avril /2018 09:38

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Propagande postcoloniale contre propagande coloniale ?

Introduction (2)

          Indiquons dès le départ que mon propos et mes critiques ne portent que sur un des segments de l’histoire, la coloniale et la postcoloniale, et éventuellement sur la qualification des chercheurs concernés par ce segment de l’histoire, comparée à d’autres segments historiquement plus choyés par les chercheurs.

          Il conviendrait naturellement aussi de replacer ce débat dans le contexte plus large des discussions toujours en cours sur la définition de l’histoire : de quelle science s’agit-il ? S’il s’agit bien d’une science.

        Ajouterais-je que le défaut de transparence de ces thèses d’histoire met sérieusement en question leur « scientificité » ! Une sorte de secret de la confession pèse sur les rapports, les débats, et les votes.

        Je voudrais revenir successivement sur les raisons de mes critiques :

      - le danger d’une propagande efficace d’autoflagellation nationale qui n’a rien à voir avec ce qu’a été la propagande coloniale de cette période historique : les auteurs de ces ouvrages n’hésitent pas à relier leur interprétation idéologique des faits à l’état d’esprit des jeunes de nos banlieues,

       - les carences de méthode  de beaucoup des contributions soi-disant historiques sur ces sujets devenus de nos jours sensibles, compte tenu à la fois de la place qu’a prise chez nous une France venue de l’immigration et de l’activisme des chercheurs animés par des lobbys politico-idéologiques efficaces.

        S’agit-il bien d’une histoire « méthodique », telle celle recommandée par Sophie Dulucq, ou d’une histoire médiatique ou idéologique ?

          Nous ne reviendrons pas sur la longue critique de la thèse d’Elise Huillery que nous avons publiée sur ce blog, une thèse de type quantitatif dont la méthode se situe aux antipodes de celle qui fait l’objet des pages qui suivent, en rappelant que ces travaux étaient également marqués du coin de l’idéologie, en dépit de la composition de son jury de thèse, avec la   présence de Thomas Piketty et d’Esther Duflo.

      - et enfin la question que je me pose très souvent en lisant les romans historiques d’auteurs que j’apprécie, Jean d’Aillon, Jean-François Parot, Claude Michelet, Christian Signol, ou Robert Van Gullik, avec une mention particulière et récente pour Antoine Garrido et son livre « Le lecteur de cadavres » au temps de la Chine ancienne, un ouvrage sur lequel nous reviendrons : est-ce qu’un roman historique de qualité n’expose pas plus de rigueur et  de respect des sources que certains ouvrages d’histoire postcoloniale ?

            Modes idéologiques ou éditoriales, mémoires se substituant à l’histoire, intervention d’une nouvelle clé d’interprétation historique, l’inconscient collectif, le ça colonial que deux historiennes reconnues ont proposé dans les travaux du « modèle de propagande postcoloniale Blanchard and Co » comme nouvelle clé d’interprétation historique...

              Un historien médiatique de l’Algérie bien connu met en avant la « mémoire qui saigne » ? La sienne ?

             Jean Pierre Renaud     Tous droits réservés

 

 

 

 

 

 

 

 

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4 avril 2018 3 04 /04 /avril /2018 09:23

Propagande postcoloniale contre propagande coloniale ?

2

En prologue 2

            Les qualificatifs que j’attribuerais volontiers à la plupart de ces textes, sont leur caractère ostentatoire, emphatique, approximatif, idéologique et politique, trop souvent éloignés de la rigueur, en même temps que de la prudence, qu’imposeraient les sujets traités.

           Je me pose une fois de plus la question, comme je l’ai déjà fait dans la longue analyse que j’ai consacrée au livre de Sophie Dulucq sur l’écriture de l’histoire coloniale, de savoir si l’histoire postcoloniale ne souffrait pas des mêmes défauts de niveau universitaire.

Introduction (1)

Descartes : « Le Discours de la Méthode »

« Les préceptes »

« Le premier était de ne recevoir jamais aucune chose pour vraie que je ne la connusse évidemment être telle…

Et le dernier, de faire partout des dénombrements si entiers et des revues si générales, que je fusse assuré de ne rien omettre. »

Une citation clé, compte tenu de l’absence quasi-complète de l’histoire quantitative dans ces travaux

 

Pourquoi ces textes de chercheur impénitent et impertinent ?

Le combat contre la désinformation postcoloniale, c’est-à-dire une nouvelle forme de subversion nationale

            Je suis né dans une famille de Franche Comté fidèle à la devise de notre province « Comtois, rends-toi, nenni ma foi », et après avoir fait de solides études universitaires, j’ai choisi de servir la France et le service public de mon pays.

            Je déplore depuis plusieurs dizaines d’années la gouvernance laxiste de notre pays, et je suis effaré par les discours idéologiques que certains groupes de chercheurs postcoloniaux déroulent sur notre histoire coloniale, avec le soutien de groupes de pression, notamment celui que j’ai qualifié de « modèle de propagande des  raisins verts », celui du sillon maghrébin, qui ont encore de l’audience dans le monde de la politique, des médias, et des éditeurs.

            Les textes ci-après ont donc l’ambition de résumer mes réflexions sur ces sujets très sensibles en suivant le plan énoncé plus haut, en me demandant en définitive si le roman historique n’était pas devenu un modèle de recherche historique plus rigoureux que les romans postcoloniaux mémoriels ou idéologiques que l’on nous projette sur le passé ou sur le présent de la France.

            Il est vrai toutefois que les spécialistes semblent avoir beaucoup de mal à distinguer dans l’extrême variété des textes publiés, ceux qui relèvent ou non de la science « historique » avec d’autant plus de difficultés que  la mode des mémoires semble déstabiliser l’univers des historiens.

            Récemment, dans le Figaro Magazine des 16 et 17 février 2018, Pierre Nora déclarait «  La dictature de la mémoire menace l’histoire », mais peut-être faudrait-il l’interroger sur les responsabilités qui ont été les siennes à ce sujet, en tant qu’historien et grand éditeur.

            Depuis une dizaine d’années, je me suis replongé dans l’histoire coloniale – un nouveau bain colonial - que j’avais étudiée au cours de mes études universitaires, après avoir lu les livres publiés – une vraie avalanche ! – par un groupe de chercheurs appartenant à ce que j’ai baptisé plus tard du nom de « collectif Blanchard and Co ».

          De façon tout à fait étrange dans le milieu des historiens, et entre historiens, Mme Coquery-Vidrovitch avait, elle, baptisé son animateur du nom d’« historien entrepreneur », ce qu’il a été ou est devenu effectivement.

         Culture coloniale ? Culture impériale ? Fracture coloniale ? République coloniale ? Mémoire coloniale ?

          Cette profusion d’appellations « pompeuses » interpellait tout à la fois ma compréhension de ces concepts, mes propres lectures des récits coloniaux, ma formation universitaire, et enfin mon passé professionnel.

        L’ensemble de ces textes propose une lecture postcoloniale de notre histoire,  qui revêt toutes les caractéristiques d’un « modèle de propagande » tel que l’a décrit Chomsky, le « modèle de propagande des raisins verts », l’expression que j’ai choisie pour dénommer un autre groupe de pression de propagande postcoloniale. 

         Le lecteur pourra se reporter à l’analyse que j’ai proposée sur ce blog, le 19 septembre 2017, sous le titre « Pouvoir et subversion »

        Depuis 2010, et à plusieurs  reprises sur ce blog, j’ai eu l’occasion de critiquer les « produits culturels » de ce collectif de chercheurs.

         Il s’agit d’un « modèle de propagande » fondé sur une idéologie de détestation du passé colonial français, pour autant qu’il ait été partagé par le peuple français, et semble avoir l’ambition d’incarner une nouvelle forme d’histoire, celle de l’autoflagellation nationale, la guerre d’Algérie imprégnant fortement ce courant.

       Je ne dis pas que ce courant d’histoire idéologique qui s’est très largement substitué au courant marxiste, soit obligatoirement représentatif de l’histoire postcoloniale, mais on pourrait le croire, à voir son succès dans les médias.

        Est-ce que l’historien idéologue Blanchard qui se multiplie dans les médias,  n’aurait pas, par exemple, son rond de serviette sur Arte, au journal « 28 minutes » ?

          En concurrence dans les médias,  avec l’historien Stora, autre modèle du genre dans une guerre supposée, mais jamais mesurée des mémoires ?

         Les appellations de ces livres cachent en fait une lecture idéologique, plus qu’historique des faits coloniaux, et je m’en suis déjà expliqué longuement à la fois sur ce blog, et dans le livre publié en 2008, sous le titre de « Supercherie coloniale ».

 

Jean Pierre Renaud                  Tous droits réservés

 

 

 

 

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20 octobre 2015 2 20 /10 /octobre /2015 15:13
« Le véritable coût de l’immigration »
A 20h40 sur France 5, le 13 octobre 2015

Commentaire du journal La Croix du même jour avec un titre déjà un peu différent :

« Ce qu’apporte l’immigration »

« Notre avis. Chiffres, définitions et interviews de spécialistes à l’appui, ce documentaire de Martine Delumeau rend le sujet intelligible et dépassionné. »

Marie Dancer

&

Notre avis

 

         Un documentaire qui apporte quelques informations sur le sujet sensible de l’immigration, mais le coût financier est-il le vrai sujet de l’immigration en France ? C’est beaucoup moins sûr.

            Idées reçues ? Idées tout faites selon la présentatrice ? S’agit-il bien de cela ?

            Ce documentaire manque à mes yeux de clarté en mélangeant une fois de plus les publics et les coûts et avantages concernés : migrants ou réfugiés, tel le cas de ce jeune étudiant afghan réfugié qui faisait la une de conclusion de Mme d’Encausse.

            Puisqu’il s’agissait, d’après le titre, d’une évaluation d’un coût rapporté à des flux d’immigration, pourquoi ne pas avoir ouvert un vrai débat avec des économistes et des démographes ? Parce qu’il n’y a pas eu de débat, mais une suite d’interventions, et surtout une galerie d’images et de portraits d’immigrés ou de réfugiés.

            M.Héran, démographe reconnu, nous explique, sauf erreur, que, sur environ 200 000 entrées, seulement 10 000 entrées concernent le travail, le reste étant dû au regroupement familial, aux mariages et aux demandeurs d’asile...

            Ces seuls chiffres mettent en porte à faux une grande partie des interventions et des interviews, et même de l’intervention de M.Dumont au titre de l’OCDE, en particulier sur la comparaison qui est faite avec l’Allemagne, une comparaison que certains pourraient trouver tendancieuse.

            Qu’en est-il des  sans- papiers, des demandeurs d’asile dont la demande a été refusée et qui pour 80 % d’entre eux restent en France, et aujourd’hui des travailleurs détachés de l’Europe de l’Est ?

            A-t-il été question du coût direct de l’immigration ou du coût indirect, avec les difficultés que notre pays rencontre pour scolariser par exemple des enfants issus du regroupement familial, avec une mère ne parlant pas notre langue, et le plus souvent en l’absence du père, ou pour accueillir des enfants mineurs étrangers abandonnés dans notre pays (voir par exemple les milliers de Mayotte), ou des mères étrangères venues accoucher en France… ?

        Je ne pense pas que  le débat de fond actuel porte seulement sur le coût financier, peut-être sur le coût marginal, pour certains observateurs, coût de l’AME par exemple, mais beaucoup plus sur le coût de l’immigration en termes de fonctionnement de la société française.

        Est-ce que MM Dumont ou Gemenne l’ont évalué ?

        Pourquoi ne pas observer aussi qu’il ne suffit pas de se contenter de disserter sur des grandeurs abstraites au niveau national ou international, sans aller sur les territoires eux-mêmes, régions, départements ou communes, pour avoir une vision plus réaliste du problème, des problèmes ? Avec le cas extrême du département de Seine Saint Denis ?

         Pourquoi ne pas oser écrire aussi – on se demande aujourd’hui si on a encore le droit de l’écrire- qu’à tort ou à raison, la poussée incontestable de l’islam en France liée au flux de l’immigration fait question ? Pourquoi ?

       Parce que les Français ne sont pas encore convaincus que cette religion soit compatible avec notre République.

      Mon avis résumé :

        1) Un débat entre économistes aurait été préférable sur le sujet, plutôt qu’une série de discours, de chiffres, mais avant tout d’images, avec la même ambiguïté permanente entre le sort des immigrés et celui des réfugiés.

      2) Le vrai sujet aurait peut-être dû porter sur la problématique mal régulée ou mal contrôlée du regroupement familial avec ses effets dans la société française aussi bien sur le plan social, culturel, et religieux, tout autant que territorial.

Jean Pierre Renaud

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