La Politique Etrangère de la France
« HENRI KISSINGER »
« DIPLOMATIE »
(1994)
Avant-propos
Le nouvel Empereur Chinois vient en France et cette visite est tout un symbole du monde actuel, entre le Nain Gaulois et le Géant Chinois, 68 millions d’habitants contre 1,412 milliard d’habitants.
Un géant qui est devenu une des nouvelles puissances du monde à pas de Géant !
Cette visite régale un Président qui a tendance à se prendre pour un des Maîtres du Monde, dans une certaine continuité avec la politique étrangère traditionnelle de la France telle que l’a décrite Henri Kissinger, mais les ordres de grandeur ont changé et les canonnières françaises sur le Yang Tsé sont depuis longtemps oubliées.
N'oublions pas que Xi Jinping est le nouvel Empereur Chinois d’une grande et ancienne civilisation capable de jouer sur tous les tableaux.
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Macron vient de faire un grand laïus à la Sorbonne sur l’Europe, en rééditant l’exercice oratoire qu’il avait déjà fait dans la même Sorbonne en 2019.
Il adore ça, mais l’art oratoire de la parole publique lui fait défaut, au moins autant que la science du commandement qui consiste à hiérarchiser ses objectifs.
La France n’est pas convaincue des résultats de la politique menée depuis 2017, 7 ans déjà, avec une succession de crises, il est vrai, d’autant plus qu’il lui laisse déjà une dette colossale de 1 000 milliards d’euros, laquelle signe une politique économique et financière désastreuse.
Aux yeux de nombreux Français, et contrairement à ce qu’il se vante d’avoir changé, le Président actuel a continué à faire la politique étrangère française, traditionnelle, c’est-à-dire celle du « coq gaulois », sans mettre en œuvre des institutions à géométrie variable adaptées à cette Union à 27 ingouvernable.
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Revenons à Kissinger et aux propos qu’il tient dans son livre aux pages 106,107, et suivantes.
« Deux révolutionnaires Napoléon III et Bismarck »
«…. Napoléon III avait encouragé la révolution sans en comprendre l’issue prévisible incapable de jauger les rapports de force et les mettre au service de ses objectifs à long terme, il avait échoué sa politique étrangère périclita non parce qu’il manquait d’idées, mais parce qu’il se montra incapable d’établir une hiérarchie entre ses nombreuses ambitions ou de les confronter aux nouvelles réalités qui se dessinaient en quête de renommée, il ne s’en tint jamais à une ligne d’action précise il se laissa bien plutôt conduire par une multiplicité d’objectifs, dont certains étaient complètement contradictoires lorsqu’il affronta la crise décisive de sa carrière, ces orientations se neutralisèrent les unes les autres…
La politique internationale en vint à se fonder sur la force pure et simple. Et dans un monde ainsi défini, un décalage s’instaurait entre l’image que la France avait d’elle-même comme nation prépondérante en Europe, et sa capacité à se montrer à la hauteur de cette image – un décalage qui n’a jamais cessé d’aveugler sa politique. Pendant le règne de Napoléon III, cette réalité fut mise en évidence par l’échec de l’empereur à réunir le fameux congrès qui entreprendrait la révision de la carte de l’Europe ce congrès, il le réclama après la guerre de Crimée en 1856, avant la guerre d’Italie en 1859,, pendant la révolte polonaise en 1863, pendant la guerre des duchés en 1864, et avant la guerre austro-prussienne en 1866, - sans faire de propositions précises, sans être disposé à risquer la guerre pour obtenir gain de cause. Napoléon III buta toujours sur le même problème : il ne se trouvait pas en position d’exiger, et ses projets étaient trop extrémistes pour susciter le consensus.
La propension de la France à s’associer avec des pays prêts à accepter son hégémonie a été une constante de sa politique étrangère depuis la guerre de Crimée. Incapable d’occuper une position dominante dans un éventuelle alliance avec la Grande Bretagne, l’Allemagne, la Russie ou les Etats Unis, et considérant une position secondaire comme incompatible avec son idée de grandeur nationale et avec son rôle messianique dans le monde, la France a recherché ce leadership dans des ententes avec des puissances de moindre rang – avec la Sardaigne, la Roumanie, et les Etats allemands intermédiaires au XIXème siècle, avec la Tchécoslovaquie, la Yougoslavie et la Roumanie dans l’entre-deux guerres.
On peut noter que la politique étrangère de la France après de Gaulle n’a pas été menée différemment. Un siècle après la guerre franco-allemande de 1870, le problème d’une Allemagne plus puissante continuait d’obséder la France. Elle fit le choix de rechercher l’amitié de ce voisin redouté et admiré or la logique géopolitique aurait dû l’inciter à créer des liens étroits avec les Etats - Unis – ne fut-ce que pour accroitre sa liberté de manœuvre Mais la fierté de la France empêcha ces liens de se tisser et la conduisit à vouloir parfois de manière irréaliste, un regroupement quel qu’il soit – à la limite n’importe quel regroupement européen – pour contrebalancer l’influence des Etats-Unis au risque même de voir l’Allemagne occuper une position dominante sur le continent.
A cet égard, la France a agi à l’occasion comme une sorte d’opposition parlementaire au leadership américain, s’efforçant de construire une communauté européenne susceptible d’offrir une solution de rechange à ce leadership et cultivant des liens avec des pays qu’elle pourrait (ou pensait pouvoir) dominer.
Depuis la fin du règne de Napoléon III, la France aura manqué de la puissance nécessaire pour imposer ses aspirations universalistes héritées de sa Révolution, et d’un champ où exercer sa ferveur missionnaire. Depuis plus d’un siècle, elle accepte difficilement que les conditions objectives de sa prépondérance, introduites par Richelieu, aient disparu après que les nations se furent unifiées en Europe. Le caractère ombrageux de sa diplomatie a tenu pour beaucoup aux efforts de ses dirigeants, soucieux de perpétuer son rôle de pivot de la politique européenne dans un environnement de plus en plus hostile à de telles ambitions. Il est paradoxal que le pays qui inventa la raison d’Etat ait dû consacrer tant d’efforts, pendant plus d’une partie du siècle, à aligner ses ambitions sur ses capacités. En vain. » (page 107)
PROLOGUE
Ne jamais oublier les leçons du grand La Fontaine !
« La grenouille qui veut se faire aussi grosse que le bœuf !
Il est vrai que les grenouilles ne jouent pas au foot !
Jean Pierre Renaaud