Lecture critique
&
« Vie et Mort de la « Françafrique » »
« L’HISTOIRE »
Avril 2024
Dossier
Page 28 à 57
Sommaire
« Le syndrome Foccart- p, 28 »
« Carte : 1958-1994, le « pré carré » français » p, 33 »
« Le pragmatisme stratégique des Africaines » p, 34 »
« L’amnésie britannique », p,38 »
Houphouët-Boigny, le pilier africain » p,40 »
Rwanda, 1994 : face au crime » p,44 »
« Carte et génocide » p,49 »
« La France est devenue un acteur secondaire », p,54 »
L’avant-propos, page 27
« L’expression militante stigmatisant les relations de la France avec ses anciennes colonies, la « Françafrique » est devenue un objet d’histoire. La « coopération » établie après les indépendances de 1960, consistait notamment à protéger les dirigeants africains qui, en pleine guerre froide, acceptaient de jouer le jeu de la France et de maintenir son influence sur le continent. Instauré par de Gaulle, son « conseiller Afrique » Jacques Foccart et le Président ivoirien, ce pacte a perduré jusqu’à la fin des années 1990. Et il dépassait le « pré carré », comme l’atteste la stratégie française en 1994 au Rwanda, ex-colonie belge. L’ouverture des archives permet de mieux comprendre la complexité de ces rapports postcoloniaux. »
Explication de texte
Cette revue propose une palette d’analyses et de conclusions sur le rôle de la France en Afrique noire au cours de la période 1945- 1994, avec l’ambition d’éclairer cet « objet d’histoire »
L’ensemble de ces chroniques appelle de ma part les remarques ci-après.
- L’avant-propos évoque à juste titre la guerre froide comme facteur de la Françafrique, mais curieusement en mentionnant notamment la nécessité de « protéger les dirigeants africains ».
« protéger » ? Vraiment ?
Pourquoi minorer ainsi le facteur clé de ce contexte historique, c’est-à-dire la guerre froide, donc la rivalité URSS-USA qui caractérisa l’histoire de toute cette période 1945-1990, avant l’effondrement de l’URSS ?
2 - Le sommaire et donc l’ensemble de cette chronique fort intéressante fait une place un peu surprenante au « pragmatisme stratégique des Africaines », première nouvelle à mes yeux et à ma connaissance de l’histoire coloniale française et de la décolonisation.
- – Un chapitre est consacré à « L’amnésie britannique », mais j’écrirais plutôt « L’intelligence britannique du business », car les Anglais n’ont jamais eu cette sorte d’esprit évangélique à la française prônant un rêve ambigu d’assimilation et de développement, le direct plutôt que l’indirect, une des caractéristiques essentielles de l’impérialisme britannique.
- - « Rwanda, 1994 : face au crime »
Années 60, l’Afrique noire française est décolonisée.
Rwanda : la France n’a jamais colonisé cette colonie belge !
Question : quelle folie a saisi les présidents de la République Française de monter dans cette galère ?
Un retour à une des causes de la colonisation française, une cause bien française, un esprit de grandeur internationale, lequel continue à causer beaucoup de dégâts dans la politique étrangère française.
Un observateur informé ne peut se poser par exemple ce type de question en entendant parler d’un rêve de puissance indo-pacifique de la France, avec un seul porte-avions, même nucléaire ?
- – « La France est devenue un acteur secondaire » p,54
par Achille Mbembe
Au fil des pages 54 à 57, l’auteur développe une analyse ambitieuse et très touffue avec un champ d’application immense.
« … La plupart des outils militaires ou symboliques auxquels la France a eu recours sur le continent sont soit désuets, soit délégitimés. Le temps est peut-être venu de s’en débarrasser, et en bon ordre. » (p,54)
Diable !!!
« Une jeunesse déboussolée » (p,55)
L’auteur propose une analyse catastrophique de la jeunesse africaine. Rappelons que l’explosion démographique date de la fin des années 60, date des indépendances de l’Afrique noire française : la faute à qui ?
L’auteur développe une analyse qui fait appel à des concepts difficiles à manipuler en tant que tels ou en tant qu’explication de la crise actuelle :
« A ces lames de fond se greffent des déplacements dans les champs culturels et imaginaire. Le plus significatif est la montée en puissance du « néosouverainisme »
« Face à l’enchevêtrement de crises en apparence inextricables, la démocratie électorale n’apparait plus comme un levier efficace des changements des changements profonds auxquels aspirent les nouvelles générations….. »
L’auteur s’érige en juge, en donneur de leçons, en prescripteur de solutions, souvent en termes de commandement, alors que les enjeux portent sur un immense continent.
« Au plus haut niveau de l’Etat français, l’emprise des militaires et des milieux du renseignement sur la politique africaine reste démesurée…. C’est à un complet réaménagement mental qu’il faut procéder pour de trouver la juste distance – ni ingérence ni indifférence – qui permettrait d’autres modes de présence, voire la construction d’un partenariat qui n’impose rien. » p,57
Plus haut, l’auteur écrivait :
« Ne restent que les chiffons rouges, les oripeaux d’une époque révolue que sont les bases militaires, le franc CFA, les magasins Auchan, et, bientôt, peut-être l’Agence Française du Développement. » p,57
Le Président Emmanuel Macron aura tenté, à plusieurs reprises, de crever l’abcès. Résultat, la France a mené, à partir de 2017, une politique africaine à deux faces. L’une nocturne, est fondée sur la psychose militaro-sécuritaire portée par une vision régressive de la paix, de la stabilité et de la sécurité sur le continent. Assumée jusque dans ses ultimes conséquences au Sahel et mise en pratique dans les relations avec les vieux potentats de l’Afrique centrale, elle a débouché sur une vertigineuse dégradation de l’image de la France en Afrique. L’autre face, plus ou moins solaire, s’est donnée à voir dans des chantiers tels que la restitution des objets d’art, le travail sur les mémoires coloniales… Adossée à la vision d’une Afrique à fuseaux multiples, mobile et ouverte sur le siècle, elle aurait pu accompagner le paradigme africain dans l’imaginaire français. Entre ces deux visages, une relation profondément mercantile est en train d’être tissée avec les Etats anglophones et lussophones, à l’exemple de l’Afrique du Sud, du Nigéria ou du Mozambique. »
Quelques remarques en conclusion sur un ce texte incantatoire, quelles sont les preuves historiques et statistiques que l’auteur propose pour accréditer son récit ?
« Le paradigme africain de l’imaginaire français » ?
A-t-il jamais existé ?
Précisons qu’Achille Mbembe fut, et est peut-être encore, un des conseillers de la politique africaine de Macron, une politique qui n’a pas été un vrai succès…
- – « Focus » « Le Franc CFA, monnaie de la discorde » page 32
Ou
« Une nouvelle Piastre Africaine ? »
70 ans après celle d’Indochine ?
Une analyse trop sommaire, et c’est bien dommage, car le sujet est d’ordre stratégique.
L’analyse proposée ne permet pas vraiment de comprendre comment fonctionne cette monnaie internationale.
La phrase : « Depuis le passage à l’euro, le franc CFA est arrimé à la monnaie européenne par une parité fixe (1 euro vaut 655, 96 francs CFA) et la France est son garant. Ses défenseurs le présentent comme une monnaie stable, facilitant la circulation des biens et des capitaux entre les pays membres de la zone franc et la France…. »
Il ne s’agirait pas de la zone géographique de la CDEAO ?
Il aurait été intéressant de disposer d’une analyse financière de cette monnaie, les pays qui en font partie, les montants des dettes de chacun des pays en bénéficiant, afin d’en mesurer l’intérêt.
Impossible d’avoir accès aux chiffres du bilan de cette zone monétaire !
Quid des dettes garanties par la France des pays du Sahel qui ont rompu avec notre pays ?
La monnaie en question ne ressemble-t-elle pas
à l’ancienne piastre d’Indochine qui a alimenté tous les trafics, pour les « usagers » bénéficiaires de cette monnaie ?
J’attends toujours une explication complète d’un système politico-économico- financier dont le fonctionnement reste clandestin.
Qui en profite véritablement ?
Jean Pierre Renaud Tous droits réservés